Devenir bûcheron ou vendre sa maison: l’inapplicable loi débroussaillage.

Publiée le 10 juillet dernier en réponse aux méga-feux de 2022, la très succinctement dénommée “loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque d’incendie” semble inapplicable sur son volet débroussaillage, et pourrait poser aux personnes concernées de nombreux problèmes de sécurité, d’assurance, de voisinage… Entre autres. Explications.

Le rendez-vous a été donné aux habitants de Soyaux par les représentants de l’ONF: une présentation des nouveautés introduites par la loi et une explication de ce que doit être un bon débroussaillage et de qui doit débroussailler.

Cette obligation vous concerne donc si votre terrain est situé à moins de 200 mètres d’un bois ou d’une forêt. Le cas échéant, il faut aussi s’assurer que tout est débroussaillé sur 50 mètres autour de votre maison et 10 mètres autour de vos voies d’accès. Les forêts, ainsi bien entretenues, doivent permettre l’intervention rapide et sécurisée des pompiers en cas d’intervention.

Ce qui rend la loi particulièrement surprenante c’est que cette obligation des 50 mètres concerne tout terrain autour des habitations, même si ces 50 mètres tombent chez un voisin ou dans une forêt elle même! Si donc votre voisin débroussaille mal son terrain vous êtes responsable et ne pourrez pas être remboursé par votre assurance en cas de dégâts d’incendie.

Cela ne serait qu’une question d’un peu de temps, de diplomatie et d’argent pour chacun si quelques outils de jardinage suffisaient pour faire un bon débroussaillage. La réalité est que sans avoir des compétences de bûcheron ou des moyens financiers conséquents il est très dur de débroussailler un bois ou une lisière comme l’exige la loi. Ce sont parfois des troncs d’arbres de 20, 30 cm de diamètres qui doivent être coupés. Sur l’image qui suit on peut voir les croix oranges qui désignent les arbres devant être coupés.

Que peuvent faire dans ce cas là les personnes âgées et/ou précaires vivant prêt d’une forêt et n’ayant pas les moyens physiquement, ou financièrement, d’abattre des arbres autour de leur maison et sur des terrains qui ne sont même pas les leurs? Comment gérer les nombreux problèmes de voisinage que cela va inévitablement entraîner? Faut-il choisir entre le risque de manier pendant des jours des outils de découpe du bois lourds et dangereux, faire travailler à grands frais une entreprise pour le faire à sa place, ou encore prendre le risque de payer une amande passée de 30 à 50 euros le m2 non débroussaillé?

Qui, enfin, pour vérifier l’application de la loi? Sur le papier, c’est la police municipale qui contrôlera le débroussaillage des terrains et forêts, mais toutes les municipalités n’ont pas l’envie ou les moyens d’en avoir une et, quand elles en ont, elles sont généralement déjà bien occupées par leurs autres missions.

Sur le principe nous sommes d’accord: une nouvelle loi était grandement justifiée et un bon débroussaillage des zones à risques est primordial. En 2022 tous les français se souviennent des terribles incendies qui ont emporté 30 000 hectares de forêts en Gironde. Dans le monde, les méga-feux se multiplient et ont déjà ravagé, pour ne citer que les exemples les plus marquants, des millions d’hectares au Canada et en Australie.

Il est donc urgent de se préparer dès cette année à la multiplication des incendies et de prendre des mesures contre les risques qui y sont associés.

Lorsque le projet de loi a été présenté en décembre 2022 le groupe LFI a d’abord proposé de s’abstenir, précisément parce qu’il ne le considérait pas comme assez ambitieux en terme de moyens financiers et de nouveaux agents de l’ONF et pompiers. D’insuffisant, le projet de loi est devenu en partie contre productif après le travail de la commission mixte paritaire. Celle-ci a supprimé la notion de stratégie interministérielle, a enterré les références à la préservation de la biodiversité, des sols et de l’eau et a refusé, entre autres, de reconnaître la profession de sapeur-pompier comme métier à risque… Dans ces conditions René Pilato et les députés insoumis ont voté contre cette loi, un avis renforcé par les explications des agents de l’ONF à Soyaux.

Car ces nouvelles obligations délèguent finalement aux Français une mission de service public qui devrait être assurée par l’Etat. C’est une évidence, au moins en ce qui concerne les débroussaillages les plus lourds, qui devraient être entrepris par des professionnels plutôt que des citoyens s’improvisant bûcherons. Malheureusement nous avons ici un nouvel exemple de loi hors-sol, pensée à Paris, bien loin des réalités du terrain.

Vous pouvez retrouver dans les liens ci-dessous le programme de La France Insoumise concernant la gestion des forêts. En donnant notamment de nouveaux moyens à l’ONF et aux sapeurs pompiers, nous pourrions mettre en place une véritable gestion de nos espaces naturels, de leur sécurité et de celle des personnes qui y vivent.

➡️ L’Avenir En Commun : défendre la foret, poumon de la planète. Lien.
➡️ Plan “METTRE EN ŒUVRE LA RÈGLE VERTE PAR LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE”. Lien.
➡️ Livret “La règle verte pour rompre avec le productivisme”. Lien.

Autres sources:

  • Dans quel cas le débroussaillage est-il obligatoire? Service-public.fr. Lien
  • Obligations légales de débroussaillement: ça chauffe à Soyaux! Charente Libre. Lien
  • Pourquoi les incendies sont aussi virulents et incontrôlables au Canada cette année? Francetvinfo.fr. Lien.
  • Combien de carbone un feu de forêt dégage-t-il dans l’atmosphère? 20minutes.fr. Lien.

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